Pourquoi envisager une rééducation ?
Comme ce mot l’indique, rééduquer signifie recommencer l’éducation.
Il est important de faire la distinction entre éducation et rééducation car dans le 1er cas, on apprend une nouvelle chose au chien tandis que dans le 2ème, on cherche à remplacer un comportement existant et inadapté par un nouveau comportement plus acceptable.
La rééducation est donc un travail plus complexe. C’est souvent un chemin long et difficile, parfois décourageant, toujours enrichissant.
Les périodes de progression sont souvent suivies de moments où plus rien ne semble bouger ou même de régressions, laissant penser que ce n’est pas possible, ce chien est irrécupérable…
Est-ce réellement nécessaire ?
La difficulté d’un travail de fond ne doit pas être sous-estimée. C’est pourquoi avant de décider d’entamer un tel processus, il est utile de se poser la question de sa nécessité.
Si le comportement dérangeant de votre animal n’a que des occasions très ponctuelles de se produire, il sera souvent plus judicieux de chercher plutôt la bonne façon de réagir à ces moments là que de se lancer dans une longue rééducation.
Par exemple, si votre chien aboie sur le facteur quand celui-ci s’arrête devant chez vous, le jeu n’en vaut pas la chandelle. Mieux vaut mettre en place des solutions de contournement du problème comme garder le chien à l’intérieur à l’heure du facteur ou lui donner une bonne chose à mâchonner au moment du passage.
En revanche, si votre chien a l’habitude d’aboyer dès qu’il entend un bruit ou voit passer quelqu’un, il y a des chances pour qu’il pourrisse votre vie et celle du voisinage. De plus, cela peut être un marqueur d’inconfort chez votre animal qui a trouvé ce moyen pour l’exprimer.
Entamer un travail de rééducation est alors effectivement une très bonne chose pour tout le monde dont votre chien.
Deuxième exemple : votre compagnon a été chahuté par des enfants dans son jeune âge et en a gardé un si mauvais souvenir qu’il fuit ou grogne lorsqu’il en croise. Outre le mal-être exprimé par votre chien, il existe un réel risque sur le plan de la sécurité qui nécessite que vous interveniez pour régler ce problème.
Mais si cette réactivité ne se manifeste que lorsque votre animal croise des personnes en fauteuil roulant, c’est un souci que vous pouvez facilement éviter en étant attentif à votre environnement et en modifiant votre trajectoire le cas échéant.
Quand faut-il procéder à une rééducation ?
Si votre animal présente de nouveaux comportements inexplicables, il convient dans un 1er temps de s’assurer qu’il n’est pas blessé ou malade.
Ainsi, si quand vous brossez Snoopy, il se met à grogner alors que c’est une activité qui ne semblait pas le déranger auparavant, c’est peut-être le signe d’une douleur que vous ignorez. Si votre chien se met à uriner dans la maison alors que la propreté est acquise depuis longtemps, il a peut-être un problème vésical…
Dans le doute, il est parfois bon de passer par la case vétérinaire avant toute action corrective.
Une fois écarté le motif de santé et si le comportement de votre chien est problématique, il est souhaitable de s’interroger le plus tôt possible sur la pertinence d’une action rééducative.
Plus le chien a d’occasion d’exprimer un même comportement indésirable et plus il se crée un historique de ce comportement. L’ancienneté de cet historique va elle-même conditionner la durée et la difficulté de la rééducation.
Un comportement ne se produit pas au hasard. Il répond à une cause et satisfait un besoin. Cette satisfaction va entraîner une répétition du comportement pour l’obtenir à nouveau.
Prenons le cas du chien qui ravage la maison quand ses propriétaires s’absentent. Ce comportement lui permet de décharger son énergie, sa colère ou son stress. Ainsi il s’apaise. Et donc il recommence à chaque absence.
Si avant de décider à agir sur le fond, on ne met en place que des solutions de fortune, on va aggraver le malaise de l’animal. D’autant que ces solutions seront souvent de type punitif comme attacher le chien, l’enfermer dans une petite pièce, le laisser dehors quel que soit le temps, etc.
Ce faisant, le problème s’incruste et lorsque l’on décide de procéder à une rééducation, l’état émotionnel du chien a empiré, les habitudes de destruction se seront installées et le travail à mener sera plus compliqué et plus long.
Les préalables
Le repérage des causes
Avant d’entreprendre un travail de rééducation il est primordial de repérer les causes du comportement indésirable.
Elles peuvent être multiples et se cumuler entre elles.
Elles peuvent être propre à l’animal (génétique) ou dues à son environnement (insatisfaction des besoins…)
Elles peuvent être liées à des émotions (frustration, anxiété…)
Ce repérage nécessite une analyse poussée car les causes qui semblent les plus évidentes ne sont pas toujours justes.
Le travail d’un comportementaliste ou d’un cynologiste est à cet égard irremplaçable car une bonne connaissance de la psychologie canine et des relations humains-chiens sont des atouts majeurs pour assurer la qualité du diagnostic.
Pour mener à bien cette analyse, Une observation fine des déclencheurs du comportement doit être menée : on s’aperçoit fréquemment que des détails a priori anodins jouent un rôle considérable dans l’attitude d’un animal à un moment donné.
Voici un exemple de cas réel : 2 chiens, un mâle et une femelle vivent au sein du même foyer et s’entendent très bien. Les deux sont propres et n’ont pas de souci de santé.
Pourtant, certaines nuits le mâle fait ses besoins dans la maison.
Problème incompréhensible pour les propriétaires jusqu’à ce qu’on prenne conscience que ces incidents se produisent toujours quand la dernière promenade du soir a été faite avec les 2 chiens en même temps ce qui est contraire aux habitudes.
Ces dérogations perturbent le mâle qui manifeste sa contrariété en se montrant agité et tourmenteur de sa compagne durant la balade. Il semble uriner mais ne fait que marquer et finalement il rentre à la maison sans s’être soulagé.
Omission qu’il rattrape durant la nuit !
Comme il a été dit au début de cet article, une rééducation est souvent un long cheminement.
Bien avant d’entamer le processus rééducatif, il va très souvent falloir rééquilibrer le chien émotionnellement.
Le rééquilibrage émotionnel
Si votre animal est agressif par anxiété, vous pourrez toujours détourner son attention des stimuli qui le font réagir ou lui apprendre à faire des pirouettes sur la tête, vous ne modifierez pas son état d’esprit et son angoisse risque même d’augmenter puisqu’il ne pourra plus l’exprimer.
Sachant qu’il ne s’agit pas d’une séance de jeu et que ce chien présente plusieurs fois par jour ce comportement, je vous propose d’observer la vidéo ci-contre et de vous poser les questions suivantes:
– Ce chien vous semble-t-il en état d’apprendre quelque chose ?
– Pensez-vous qu’il s’agisse d’un animal serein ?
– L’émotion qu’il exprime vous semble-t-elle joyeuse et positive ?
Ce que nous visionnons là est un comportement généralement généré par une forte anxiété.
Il faudra s’attacher à tranquilliser le chien de façon profonde et durable avant d’envisager des exercices éducatifs.
Dans ce travail préliminaire, on s’attachera notamment :
- à renforcer les liens entre chien et propriétaires
- à aménager l’environnement en fonction des caractéristiques du chien
- à trouver les moyens de mieux répondre à ses besoins fondamentaux tout en tenant compte des besoins et possibilités des humains qui composent le foyer
- à apporter au chien une confiance en lui qui fait fréquemment défaut dans les problèmes de comportement
- à apaiser les émotions négatives ressenties par les humains et par le chien à cause de ce comportement
Une fois les causes du comportement identifiées et le travail de rééquilibrage émotionnel effectué, le moment est venu de passer à un plan de rééducation pour construire les nouvelles réponses du chien.
Les méthodes
Se méfier des « recettes » clés en main
En matière de rééducation, les conseils trouvés sur internet sont quasiment toujours inadaptés. En effet, ils sont génériques et ne tiennent pas compte de la cause pour laquelle le mauvais comportement est produit par votre chien.
On trouve sur les sites de nombreuses recommandations sur la conduite à tenir si votre chien ne revient pas au rappel, s’il aboie trop, s’il fugue, etc.
Mais les raisons pour lesquelles il se conduit ainsi ne sont pas évoquées et pour cause : l’auteur ne connaît pas VOTRE chien !
Par exemple : vous lisez un mode d’emploi très détaillé pour rééduquer les chiens aboyeurs.
Si votre chien aboie parce qu’il s’ennuie fermement toute la journée ou parce qu’il est anxieux, vous pourrez toujours mettre en œuvre les « recettes » trouvées, ça ne marchera pas. Ou pas longtemps. Ou votre chien trouvera un autre moyen d’exprimer son inconfort.
Même s’ils sont toujours incomplets et font courir le risque de construction de mauvaises bases, les tutos ou articles trouvés sur internet peuvent être utiles pour apprendre quelques techniques simples destinées à l’éducation. Mais il sont à proscrire en matière de rééducation.
En revanche, une fois les causes bien identifiées et le travail préalable mis en place, les tutoriels peuvent de nouveau être consultés en fonction du plan de travail retenu.
Une rééducation menée à l’intuition ou en suivant des conseils standardisés est à court ou moyen terme vouée à l’échec.
Or, ce sont ces échecs qui finissent par provoquer des conséquences désastreuses comme un désintérêt pour son chien, des abandons ou des euthanasies.
Alors, comment procéder ?
De ce qui a été précédemment écrit, vous en déduirez aisément qu’il n’y a pas de méthode standard en matière de rééducation.
Je ne saurai trop vous conseiller de faire appel à un professionnel canin avec une compétence de comportementaliste. En effet, en matière de rééducation, la compréhension du contexte et l’analyse fine du comportement indésirable sont indispensables pour élaborer un plan de travail efficace.
Il existe bien sûr des outils qui ont fait la preuve de leur efficacité. Mais il est impossible de dire : tel comportement = telle technique.
On recherche un vrai résultat et non pas :
- le report d’un comportement indésirable vers un autre comportement également gênant
- un succès éphémère qui au fil du temps s’amenuisera jusqu’au retour à la situation de départ
- une réussite au détriment de la santé émotionnelle du chien
La méthode employée devra correspondre à votre situation, à votre chien et à votre relation.
Quelques constantes doivent cependant être notées :
- les séances de travail doivent toujours être dans un environnement sous contrôle afin de ne pas mettre le chien en situation d’échec. Ainsi, si le chien est réactif vis-à-vis de ses congénères, il ne faudra surtout pas débuter le travail à proximité d’autres chiens.
- La rééducation doit se faire en tenant compte du chien bien entendu mais aussi du ou des propriétaires de ce chien.
En effet, le succès d’un plan de rééducation (et d’éducation également) dépend de la volonté et des capacités des humains à le mettre en place.
Si je vous demande de sortir votre chien à 5h du matin avant que la ville ne se soit éveillée mais que vous avez l’habitude de vous coucher à 2h, vous ne tiendrez pas le rythme très longtemps…
C’est pourquoi toute éducation ou rééducation doit se faire dans le respect de tous les membres du foyer, chien et autres animaux inclus.
Le mode de vie doit être, soit compatible avec les actions proposées soit aménageable dans la limite des possibilités et des envies des propriétaires.
Je vous conseille de fuir toutes propositions qui ne seraient pas en accord avec vos valeurs et vos convictions ou encore qui ne semblent pas respecter vos possibilités ou celles de votre chien.
- Le travail qui sera effectué avec le chien s’appuiera sur les connaissances des lois de l’apprentissage et rejoindra donc, à ce moment-là, les méthodes utilisées en éducation de base.
Enfin, gardez à l’esprit que patience et constance seront les maîtres-mots dans votre travail avec votre animal.
Une rééducation, malgré ses difficultés, est un merveilleux voyage au cours duquel chaque progrès sera une joie, chaque succès une fête et à l’arrivée, un lien renforcé par les moments traversés ensemble vous et votre chien.