Je voudrais connaître la musique dont la queue de mon chien bat la mesure. (Yvan Audouard)
La vie de toute espèce, de tout être vivant est basée sur la communication. Sans elle, il ne peut y avoir d’échanges, de reproduction, ni même de vie.
La communication est un échange qui part d’un émetteur et parvient à un récepteur. Malgré la simplicité du mécanisme, il s’agit en fait d’une opération très complexe car au milieu, se trouve…l’interprétation.
Chaque interlocuteur a sa propre représentation du monde et sa propre sensibilité. Rien d’étonnant donc à ce que l’incompréhension et le conflit s’installent facilement.
Et ce qui est vrai au sein d’une même espèce, l’est encore davantage entre deux espèces différentes puisqu’il n’y a pas eu d’imprégnation dès la naissance.
Alors, quels sont les modes de communication du chien et comment faire pour bien communiquer avec lui ?
Nous allons passer en revue les principaux modes de communication dont dispose le chien pour se faire comprendre de nous et de ses congénères.
A partir de là, nous aurons les outils pour, à notre tour, apprendre à nous adresser à notre compagnon et nous en faire comprendre.
La communication sonore
Nous connaissons tous les aboiements, les gémissements, les grognements que peut émettre le chien. Mais bien souvent la subtilité de ces sons nous échappe.
Par exemple, quand un chien gémit, nous pensons qu’il ne va pas bien : soit qu’il souffre soit qu’il « supplie ». C’est effectivement souvent le cas. Pourtant, il arrive que le chien gémisse en situation de jeu. Nous serions alors mal avisé de le stopper.
Les grognements sont aussi parfois mal interprétés : bien sûr, très souvent il s’agit d’un avertissement quand le chien se sent menacé. Mais avez-vous observé 2 chiens en plein jeu ? Des grognements sont souvent émis dans le feu de l’action. Nulle menace ici. Il y a également les grognements de satisfaction du chien occupé à mâchonner un excellent os charnu…
Que dire des aboiements ? Selon la tonalité, le rythme, l’intensité ou la fréquence, l’aboiement peut être un vecteur de communication de bon nombre d’émotions ou d’intentions très différentes : peur, appel, alarme, jeu, frustration…
Le répertoire sonore des chiens est très étendu et les exemples précédents montrent que leur communication vocale est parfois difficile à décrypter.
C’est pourquoi, il faut également observer la posture du chien.
La communication posturale
Pour comprendre ce qu’un chien veut exprimer, il est important de savoir décoder son langage corporel.
Ce langage, le chien l’apprend très tôt, avec sa mère et sa fratrie puis pendant la période de socialisation.
L’ensemble de la posture doit être observée pour saisir les émotions ou les intentions du chien.
Ainsi, une croyance très répandue postule que si le chien bat de la queue c’est qu’il est heureux. En réalité, le battement de queue traduit une émotion que celle-ci soit positive ou négative.
Un chien irrité peut avoir la queue qui bat ; un chien content également. La différence sera dans l’amplitude du mouvement et la rigidité de la queue.
Autre exemple : le chien qui a peur a tendance à adopter une posture basse, queue entre les pattes, oreilles couchées… Mais si en même temps, il a le regard fixe ou qu’il bave, vous avez affaire à un chien en mode de préattaque qui peut devenir très rapidement dangereux.
Tout le monde sait reconnaître la posture de l’appel au jeu : pattes antérieures repliées, croupe soulevée. Mais cette posture peut aussi être utilisée par un chien qui ne sait pas trop ce qu’on lui veut et qui cherche donc à montrer ses intentions pacifiques.
Les exemples sont nombreux des différents signaux posturaux que peut envoyer le chien dans sa communication.
Ainsi un chien qui se soumet va avoir tendance à se mettre sur le dos, un chien qui craint quelque chose qu’il juge trop près de lui va hérisser son poil, un corps rigide et tendu va traduire une émotion négative alors qu’une démarche souple dénotera un animal détendu, etc.
Turid Rugaas, célèbre éducatrice norvégienne a été la première à décoder les différents signaux qu’émet le chien qui est mal à l’aise. Je ne peux que vous conseiller son livre « Les signaux d’apaisement – Les bases de la communication canine ».
Vous y apprendrez à lire votre chien ou le chien qui vous fait face et ainsi à comprendre son émotion face à une situation donnée. Il sera néanmoins important de garder un œil critique : un chien qui baille peut manifester un inconfort ou…une envie de dormir !
La communication olfactive
On le sait, l’odorat est le sens le plus développé chez le chien. C’est principalement à travers lui qu’il décrypte le monde qui l’entoure.
La muqueuse olfactive du chien varie entre 80 et 200 cm2 selon la longueur de son museau. Par comparaison, la muqueuse de l’humain est d’environ 5 cm2. Donc, même le chien à la face la plus écrasée possible dispose d’une capacité olfactive 16 fois supérieure à celle de l’homme.
L’odorat du chien lui permet de communiquer avec ses congénères.
Vous avez sans doute remarqué que la première chose que font des chiens qui se rencontrent, est de se renifler le derrière et la truffe. Aucun vice là-dessous 😊! Juste une prise de connaissance de l’autre individu.
De même, le chien qui passe son temps de promenade à s’arrêter partout pour flairer les odeurs d’urines ou de phéromones laissées par d’autres. Il collecte toutes les informations possibles sur la gente canine qui l’a précédé dans les lieux : sexe, maturité sexuelle, état de santé ou émotions des congénères sont ainsi décodés par Snoopy.
Lui aussi, lâchera son petit jet pour signer son passage !
Les odeurs humaines apportent également une mine d’informations aux chiens. Principalement les paumes des mains, les aisselles, les parties génitales et la plante des pieds. Alors si votre loulou a la fâcheuse tendance à venir vous renifler entre les jambes, sachez que c’est naturel pour lui ! Pour le détourner, présentez lui la paume d’une main…
La communication visuelle
Nous avons établi que le chien émet différents signaux de communication vers les autres individus, humains inclus.
La réciproque est vraie : Le chien reçoit et comprend les signaux que lui envoient un congénère ou un humain.
Très souvent, les chiens qui souffrent de déficit sensoriel ne savent pas émettre ou recevoir les bons signaux. On dit qu’ils sont « mal codés ». Ces déficits sont souvent source de conflit voire de bagarre entre chiens.
Certains chiens sont aussi mal perçus par leurs congénères. Ainsi ceux à la face écrasée, ceux qui n’ont pas de poils ou encore ceux aux oreilles coupées sont plus souvent victimes d’agressions car non lisibles.
Certaines pratiques humaines qui relèvent de l’anthropomorphisme peuvent nuire à la communication visuelle. Ainsi, les chiens habillés de façon excessive par leurs propriétaires encourent un risque plus important d’être attaqués par des congénères qui peinent à reconnaître des homologues et peuvent avoir une réaction agressive par peur.
Comment comprendre la communication des chiens entre eux ?
Tous les signaux décrits ci-dessus sont connus par la grande majorité des chiens.
L’apprentissage de la communication commence dès la naissance et relève de la prévention. Si le chiot voit le jour dans un environnement favorable, il intègrera les codes de son espèces à partir de la 3ème semaine : inhibition de la morsure, jeux, signes d’apaisement…tous ces signaux se mettent normalement en place avec la mère et la fratrie.
Cet apprentissage se poursuit tout au long de la socialisation du chiot. Il apprendra à lire les signaux humains mais aussi, développera ses modes de communication avec ses congénères à travers les différentes rencontres qu’il fera.
A ce titre, les écoles de chiots sont très utiles pour parfaire l’éducation du chien dans ses approches de congénères.
Quand deux chiens sont bien codés, tous les modes de communication décrits auparavant vont entrer en jeu et les animaux se comprendront très bien grâce à leurs mimiques, postures, sons…
Si on observe la rencontre entre deux chiens équilibrés, on remarque qu’ils s’abordent le plus souvent en courbe, se renifle le museau et le derrière puis décident de la conduite à tenir : indifférence, jeu, éventuellement signes d’hostilité.
Ces rituels sont très utiles pour informer chaque individu des intentions et des émotions de l’autre. Ils permettent de désamorcer des conflits, de comprendre la situation.
Les propriétaires de deux chiens qui se rencontrent pour la première fois doivent être vigilants : si un chien est en laisse alors que l’autre est lâché, il y a une discordance pouvant amener à une communication défectueuse. D’ailleurs il est fréquent qu’un chien très sociable en liberté soit par ailleurs irritable lorsqu’il est retenu par la laisse.
Comment bien communiquer avec mon chien ?
Pour avoir une bonne communication avec son chien, il faut d’abord accepter que ce dernier ne parle pas notre langage.
Cela semble évident mais combien de personnes font de longs discours à leurs chiens pour lui expliquer ce qu’il peut ou ne peut pas faire ?
Si vous dites à Snoopy « Je ne suis pas content ! Je veux que tu reviennes tout de suite quand je t’appelle ! », sachez-bien que vous l’avez perdu dès le 2ème mot !
Snoopy se moque bien de vos monologues, il ne les comprend pas.
Dans le même esprit, si vous le saoulez de paroles au quotidien, vos mots ne deviendront pour lui qu’un bruit de fond auquel il s’accoutumera et au moment où vous lui demanderez quelque chose, il risque fort d’avoir une attitude du genre « cause toujours, tu m’intéresses… » !
Bien sûr, il y a des moments où vous avez besoin de parler à votre animal, de prononcer des mots.
Afin qu’il comprenne que c’est à lui que vous vous adressez et non à votre conjoint, enfant, voisin…le mieux est de lui réserver une intonation particulière.
Spontanément d’ailleurs, nous avons tendance à utiliser une tonalité de voix plus haute lorsque l’on s’adresse à son animal. Comme nous le faisons avec un petit enfant. Ce décrochage de tonalité est de nature à éveiller l’attention du chien qui a appris à reconnaître le ton qui lui est réservé.
Mais la meilleure façon de communiquer est d’apprendre à « parler chien ».
Comment cela ?
Tout simplement en l’observant attentivement et en utilisant vous-mêmes certains des signaux qu’il produit spontanément.
On est d’accord, il n’est pas forcément facile de prendre la position coudes au sol et arrière-train relevé quand on veut entraîner Snoopy dans un jeu.
On ne sera pas non plus capable de se hérisser les poils du dos pour lui montrer que nous ne sommes vraiment pas content !
Mais nous pouvons émettre bon nombre de signaux de communication qui seront parfaitement perçus par notre compagnon canin :
- Tourner la tête quand vous ne souhaitez pas répondre à une sollicitation de votre chien
- Cligner lentement des paupières pour lui manifester votre bien-être
- Retrousser les lèvres ou écarquiller les yeux pour exprimer votre mécontentement
- Taper sur votre cuisse (ou flairer le sol) pour lui demander de venir
- Emettre un couinement pour lui faire cesser son mordillement
- Etc.
Notre routine quotidienne est également une importante source d’apprentissage pour nos animaux.
Quand vous prenez la laisse, c’est une communication : Snoopy comprend que c’est l’heure de la promenade. Mais si vous emmenez la laisse dans la salle de bains, le message « je vais prendre une douche » est également reçu 5/5 !
Quand vous ouvrez la porte pour qu’il arrête de gratter c’est également une communication : gratte pour obtenir !
Si vous mettez vos escarpins, vous communiquez que vous sortez sans lui…
Enfin, tous les apprentissages que nous menons avec notre chien entraîne des routines de mots et/ou de gestuelles qu’il va intégrer et qui seront autant de vecteurs de communication. Si en apprenant le « assis » vous utilisez un geste de la main, ce geste sera le mot de communication qui demande au chien de s’assoir.
On le voit, les façons de communiquer sont très diverses.
Au-delà de la manière et quel que soit le message que l’on veut faire passer à son chien, certaines règles sont essentielles :
- Savoir précisément ce que l’on veut et en être convaincu : si le propriétaire n’est pas sûr de lui, le chien fera ce qui lui semblera le plus intéressant (obéir ou pas)
- Être clair dans son signal : mots et gestes ne doivent pas varier
- Être cohérent entre le geste ou le mot et la posture : se pencher sur le chien avec les yeux écarquillés en disant « bon chien » risque fort d’être très mal interprété
- Ne pas oublier que le ton l’emporte sur le mot : traitez Snoopy de grosse patate avec un ton enjoué et il sera content. Dites-lui « C’est bien mon chien ! » d’une voix grave et menaçante et le voilà tout apeuré…
Votre chien ne demande qu’à échanger avec vous. Observation et cohérence sont les maîtres mots pour, pas à pas, améliorer votre communication avec lui.